« Un deuxième verre? Quelque chose de plus appétissant... »
« Barre toi! »
« Whouaouuu... Eh poulette, on parle pas comme ça aux ... ARGHH!»
Ses articulations blanchirent sous la pression. La main de la jeune femme enserrait la gorge de l'emmerdeur d'une poigne de fer. Son corps se mit à trembler sous la colère et elle relâcha subitement son étreinte, comme brûlée au fer rouge. Le petit pub c'était tu. Chacun détaillait cette inconnue aux airs revêches. Le silence qui y régnait contrastait avec le chahu d'il y a peu.
Sélène était entrée ici comme dans l'arche de Noé, les ondées dehors annonçait un déluge sans fin. La pluie ne la dérangeait pas en soin. Enfin, plus depuis sa transformation. Cependant elle ne voulait pas accepter ses changements. A l'époque elle frémissait à la moindre goutte de pluie, maintenant, un orage aurait pu éclater qu'elle se serait cru allongée près d'un bon feu, et elle détestait ça. Se sentir différente, et ne rien pouvoir contrôler. Bon d'accord, son bâteau de sauvetage avait plus l'impression d'avoir épargné tout les damnés de la terre, des alcoolos de service en passant par les ouvriers des docks pour arriver jusqu'aux mecs louches et aux femmes tout aussi clean. Elle s'accouda au comptoir et commanda un café chaud. Le barman eut un léger sourire avant de préparer sa commande. Sélène s'en soucia à peine, son attention accaparée vers les odeurs relevées par la pluie. C'était si nouveau, et elle se sentait si seule. Seule face à un corps qu'elle ne reconnaissait plus, ses muscles s'étaient développés, et sa peau brûlante avait déjà essuyée les quelques traces d'eau. Un homme bourru aux cheveux dégoulinants d'eau prit place à ses côtés et ne cessa de l'observer pendant tout le temps qu'elle avala son café. Vous connaissez sans doute la suite.
La plupart des filles détestent qu'on les regarde comme des amuses gueules. La plupart d'entre elles s'écartent de ces pauvres mecs aux allures de pervers, et une autre partie, plus petite, ont même le courage d'envoyer paitre l'animal, seul un minuscle et infime pourcentage réagissent par la violence, et Sélène semblait toute droite désignée pour cette dernière catégorie.
L'homme a ses pieds porta la main à sa gorge et se releva lentement, le regard noir. La jeune femme fit peser un long regard sur son auditoire. Chaque parcelle de sa peau la brûlait et vibrait à l'unisson des tambours de la pluie. La blonde tapageuse ne demanda pas son reste et courut vers la porte de sortie. Avant que quiconque est pu faire un geste, elle avait disparu sous le rideau de pluie.
Courir, courir pour oublier, laisser la pluie, sa froideur la gagner, ne pas... ne jamais... se transformer en ville.
A bout de souffle elle tourna au coin de la rue proche et s'adossa au mur inondé. Fermant les yeux, elle se laissa glisser et cacha sa tête entre ses bras. Là, à l'abri des regards, dans cet espace sombre, le seul refuge qui lui restait à présent, Sélène laissa les gouttes amères des larmes se noyer à celles de la pluie.